Depuis que ma mère et ma tante ont quitté Lisbonne, le beau temps remontre le bout de son nez ! Une partie longue et incertaine commence ici. Mais pas désagréable. Je vais avoir le temps d’écrire quelques articles, de travailler mon portugais et aussi de faire l’entretien de mon vélo. Si le vent le permet, j’irai bien survoler aussi un peu cette côte ouest portugaise (les plages de Caparica) ! Là n’est cependant pas le sujet de cet article, qui résume plutôt la traversée de l’Espagne et du nord du Portugal. Dans les grandes lignes, nous avons suivi une partie du Camino Frances (sentier de Compostelle) puis après avoir longé la frontière hispano-portuguèse du nord jusqu’à Verìn, nous sommes redescendu par Montelegre direction Braga puis Porto. Enfin, pour la dernière partie j’ai suivi les traces de l’Eurovelo 1 (loin d’être finie mais dont le tracé est déjà planifié et disponible).
Comme un lundi
La reprise commença le lundi 1 avril. Pendant deux semaines, et accompagné de mon ami Jens, nous pédalerons pendant exactement deux semaines et arriveront le dimanche 14 à Porto. Cette parenthèse à Arbas est à la fois passée vite mais assez doucement pour se reposer.
Se remettre en selle après une pause est d’une part difficile mais soulage aussi un manque. Aussi bizarre que cela puisse paraître, après quelques jours de break, l’envie de pédaler, de mouvement, se fait sentir. Cette première reprise m’apprendra cependant qu’il ne faut pas trop forcer… Un poil optimiste, je prévoyais 140 km. Ce fût trop. En plus de cela, les coteaux ne rendaient pas la tâche plus facile. Si bien qu’en arrivant chez nos hôtes Warmshowers, près de Pau, je tomba de fatigue.
Warmshowers (“douche chaude”) c’est un réseau solidaire de voyageur cycliste. Le concept est similaire au Couchsurfing (littéralement “surfer le canapé”) mais ajoute d’office une affinité au vélo entre l’hôte et l’invité. Nous avons au cours du voyage beaucoup utilisé ces deux réseaux, qui en plus d’une douche, permet de faire des rencontres très enrichissantes !
Ces deux semaines étaient l’occasion de réaliser plusieurs “premières” : utilisation des réseaux d’hébergement (Warmshowers et Couchsurfing), pédalage dans toutes conditions (vent, pluie, grêle), dormir dans la neige, passer des cols… Pédaler à deux était, je pense, assez bénéfique en ce début de voyage. À deux l’on dispose de plus de temps, il est donc plus facile de prévoir les étapes. C’est aussi bien pratique pour faire les courses et répartir du poids. Enfin, partager ces moments avec quelqu’un est le plus important. Cela m’a permis de prendre un peu mon rythme et aussi de gagner de la confiance.
Une frontière enneigée, deux nouveaux pays
Dès le mardi, nous arrivons au pays basque verdoyant et humide. À peine les coteaux terminés, que des cols se présentent à nous. Le col d’Osquich notamment, aura marqué mon esprit… pendant son ascension, je me motivai en pensant au fromage basque très présent sur le bord des routes ! Nous avons décidé la veille à quel niveau nous traverserions. Le principal paramètre dimensionnant étant le dénivelé (et bien-sûr le revêtement/traffic de la route). Nos hôtes nous ont bien conseillés, et nous passerons par une vallée vers Saint-Jean Pied de Port, départ du Camino Frances, un des nombreux sentiers menant à Compostelle.
La traversée attendra, car nous préférons pédaler au soleil, surtout lorsqu’il faut grimper 1200m ! Nos journées se ressembleront et suivront globalement le schéma suivant :
- 7h : réveil, petit déjeuner, préparation des sacoches et vélos
- 8h30 : départ “théorique”
- 9h : départ réel
- 12h30 : pause fringale et contact d’un hôte pour le lendemain (ou le soir même)
- 14h (ou après ⅔ du trajet journalier) : grosse pause déjeuner
- 17h : pause banane/chocolat
- 19h : arrivée chez l’hôte ou recherche d’endroit où bivouaquer
Pour tenir ce rythme, nous décidons de pédaler 2 jours sur 3 ou 3 jours sur 4 si nous sommes en forme. La seule fois où nous avons dépassé ce schéma (4 jours de pédalage d’affilé), je finis vraiment sur les rotules ! Ce sera donc la limite ! Pour les hébergements, nous avons utilisé les deux réseaux mentionnés plus haut et les Albergue (auberges de pèlerins). La tente nous aura accueillis seulement trois fois. Mais revenons à nos montées…
Au matin du jour-J (un jeudi), une surprise nous attend : tous les sommets environnants sont enneigés (alors que l’altitude ne dépassait pas les 1000m). Malgré les superbes paysages offerts par cette mise en neige, les doutes commencent à nous envahir concernant le col que nous devons passer… à priori il devrait être au moins déneigé pour les voitures… Sur le chemin nous nous arrêtons dans une cave pour acheter une bouteille du très bon vin local goûté la veille, le Gabe (“sans” en basque, car sans sulfite). Ce sera un bon cadeau à partager avec nos futurs hôtes.
Après Urepel débute la montée au col, du moins la partie raide. Elle va durer 500m et c’est la plus longue depuis le début du voyage. Heureusement que les oiseaux nous encouragent de leur chant gai. Il nous faudra 30 min de moins que prévu pour venir à bout du col. Place ensuite à la descente, et une bonne pause dans un bar pour se réchauffer. Nous aurons croisé qu’une seule voiture pendant l’ascension, cette route était vraiment sauvage et peu pratiquée. Les 40 km restant sont principalement de la descente et un petit col, ça passera assez vite et l’on croisera beaucoup de coureurs cyclistes qui nous saluent sur leur passage.
España d’une seule traite !
Très caractéristique de l’Espagne, et info intéressante pour le cycliste pressé (oui, je m’essaie aux oxymores) : les autoroutes gratuites concurrencent les routes nationales, qui sont donc vides ! La preuve étant que sur ces routes désertes, nous croiserons plusieurs stations services abandonnées, qui rappellent celles des séries de zombies…
Nous traverserons les communautés autonomes (équivalentes à nos régions) de Navarre, la Rioja, Castille et Léon et la Galice. Au début, le vent et la pluie nous accompagnaient. À chaque fois que nous croisions des éoliennes le vent était évidemment de la partie et en plus de face ! Les étapes furent difficiles jusqu’à Benavente, mais nous trouvions toujours des petits cafés où nous réfugier et sécher un peu. Mais cela n’enlèvera rien au charme des régions traversées ! Le Camino Frances a un succès mérité. Les paysages changeant de la forêt enneigée, aux plaines africaines avec une terre rouge, en passant par des champs verts vallonnés. On ne compte plus les châteaux croisés sur le chemin. Parmi les deux moments les plus difficiles, une nuit dans la neige et l’arrivée sous la pluie à Logroño. À Padornelo, vers 1300m d’altitude, nous avons monté la tente sur la neige. Nous pensons que la température nocturne était entre -3° et -5°C et l’équipement de Jens supporte 10-15°C minimum…Pour éviter d’avoir à décongeler Jens au matin, nous échangeons nos sacs de couchage (l’isolation de mon matelas aidera à conserver un peu de chaleur). Malgré cela, nous devrons tout de même utiliser la couverture de survie (vers 1h du matin) par dessus les sacs (en plus de dormir habillés). Ce n’était pas la meilleure nuit que l’on ait passée ! L’arrivée sur Logroño, elle, était surtout dure psychologiquement. Il nous restait seulement 30 km à faire et le vent semblait en notre faveur. Puis le ciel a commencé à noircir. D’un seul coup, nous nous retrouvâmes dans une violente averse avec un vent de face, le tout sur 15 km de nationale fréquentée… Nous étions trempés de la tête aux pieds, les mains gelées, et le moral au plus bas. Dans ces moments là on se demande ce que l’on fait là ! Mais ça ne dure “que” deux heures en sachant que l’on finira au chaud…
À partir de Benavente par contre, tout nous semblait plus facile ! D’une part, les étapes étaient surtout descendantes, et le vent beaucoup plus calme. Verín sera notre dernière étape espagnole, nous franchirons la frontière avec les Portugal plus au sud ouest d’ici. Après deux jours de vélo nous ferons néanmoins une pause à Verín. Grand ciel bleu, petite randonnée suivit d’un cours de pente école pour Jens et Victor, notre hôte. L’endroit est loin d’être idéal mais suffira pour les sensations du décollage et quelques bases. Nous quitterons l’Espagne et ses collines sauvages de Galice, aux paysages secs, pour rejoindre les vallées verdoyantes de l’autre côté.
Les pavés et les vallées du Portugal
De Montelegre, nous rejoindrons Rendufinho puis Porto en deux jours. La différence entre chaque côté de la frontière est flagrante : du jaune nous sommes passés au vert. C’est une région où il pleut apparemment beaucoup d’après Marco, un local. Beaucoup de gens que nous rencontrons parlent français, ce qui nous aide bien car notre portugais est pire que notre espagnol ! Contrairement à l’Espagne, les autoroutes sont payantes, donc les nationales sont plus empruntées. En plus, la plupart des villes (et villages) ont toujours des routes pavées, qui ne sont pas très agréables pour Jens (en vélo de course). Hasard de calendrier : le Paris Roubaix (course cycliste sur pavés) a lieu ce dimanche et un flamand remportera l’étape (257km en 6h, du 43kmh de moyenne, nous en sommes loin !).
Braga a l’air d’être une jolie ville mais nous nous arrêtons juste le temps d’un café et une Pastel de nata, la pâtisserie nationale. L’envie d’arriver à Porto est trop forte. Jens me quitte le mardi soir, nous avons fait un bon bout de chemin ensemble, et affronté pluie, vent, pavé, chemin et nationales dangereuses ! On ne l’oubliera pas ! Grâce à lui, j’ai aussi commencé à prendre un rythme. J’espère que l’expérience aura été aussi bénéfique pour lui, mais je n’en doute pas.
En attendant que le vent tourne et que le soleil revienne, je prévois mon départ pour Lisbonne le jeudi. mon trajet suivra l’Eurovelo 1 dont le tracé a été défini mais qui n’est pas encore terminée (ne comptez pas sur le fléchage voire même une piste carrossable par endroits). Cependant, la côte est très belle et l’EV1 traverse beaucoup de forêts. Une bonne partie de ces forêts a brûlé pendant l’été 2017 (environ 100 morts cette année là), et la situation risque de ne pas s’améliorer avec le changement climatique… C’est bien dommage car le bivouac au milieu des pins était fort agréable…
Avoir un toit pour la nuit est un bon prétexte pour une étape un peu longue. Du moins pour moi ! Je ferai environ 130 km pour rejoindre les hôtes de Caldas da Rhaina, un couple de voyageur au palmarès impressionnant. Parti en vélo, ils ont voyagé pendant 13 ans ! Et Ils viennent juste de s’installer au Portugal le temps de souffler. Une soirée aura été trop courte pour échanger avec Amaya et Éric, je décide donc de rester une journée de plus chez eux, Lisbonne attendra ! C’est aussi l’occasion de visiter Obidos, une jolie ville médiévale pas loin de Caldas.
Encore des adieux en partant, superbe rencontre avec ces bons baroudeurs cyclistes. Journée très efficace départ à 7:10 et arrivée à 13h10 à Lisbonne ! Un peu de vent de dos certainement ! Je pose le vélo à l’hôtel puis vais explorer les marinas du Rio Tejo. C’est ici que je chercherai un bateau pour les Canaries.
Bonjour Jules,Bravo pour tes talents d’écrivain.C’est vivant parce que c’est vécu et tes aventures intéressent.C’est comme un feuilleton nous attendons la suite!Par delà ces considérations,je suis assez préoccupé par ta décision de passer par le Maroc dont il faut connaitre les us et coutumes si on ne veut pas s’exposer à de graves ennuis pour un voyageur.Je vais donc sans plus tarder donner tes coordonnées(site,tel mobile et adresse mail)pour qu’il t’indique les pratiques à utiliser dans ce pays)à Jean Claude Cognard né au Maroc,parlant l’arabe et voyageant régulièrement dans ce pays en moto ou en 4/4 pour qu’il te prodigue les conseils de base.Papi.